Femmes et travail



La sociologie souligne que, malgré une égalité des droits acquise assez récemment, les inégalités économiques entre les hommes et les femmes persistent. Ces inégalités ne sont pas analysées par les sociologues comme le produit d’une inégalité naturelle entre hommes et femmes, mais comme la conséquence d’une construction sociale. C’est ce que traduit la notion de genre, qui désigne des différences liées à une construction sociale. En effet, bon nombre des comportements ou des caractéristiques des hommes et des femmes que l’on considère comme naturels varient d’une société à l’autre comme nous l’apprend l’ethnologie.

Les inégalités dans le monde professionnel entre homme et femme sont présentes à différents niveaux et apparaissent dès la scolarisation.

 

 

Etudes et orientation professionnelle.

 

Les enquêtes menées sur le parcours scolaire des filles et des garçons laissent apparaître que les filles ont de meilleurs résultats scolaires que les garçons, du moins au début de la scolarité. Mais cet avantage ne se traduit pas ensuite dans les orientations professionnelles. A résultat égal, les filles sont orientées plus facilement vers des filières jugées moins prestigieuses.

En particulier, certaines professions sont jugées plus féminines. Ce sont plus spécifiquement toutes celles qui sont associées au soin et à la sollicitude. Les femmes sont considérées traditionnellement dans nos sociétés comme ayant pour rôle de s’occuper des autres, en particulier des enfants. Cela induit des différences d’éducation entre filles et garçons qui influent sur les comportements et les goûts de chaque sexe. Ces aspects sont résumés par les sociologues sous le terme anglais de Care. Le fait pour une profession d’être féminisée conduit corrélativement à sa dévalorisation sociale.

 

Accès à l’emploi et type de contrats

 

Après la fin des études et au moment de la recherche d’emploi, les femmes subissent une discrimination à l’embauche par rapport aux hommes. Le fait d’être une femme est, avant même le critère « racial », le premier facteur de discrimination.

Ces difficultés d’accès à l’emploi que rencontrent les femmes se traduisent également par un taux de chômage plus important des femmes que celui des hommes (à l’exception des jeunes hommes), mais également par des contrats plus précaires et des temps partiels le plus souvent occupés par des femmes. Les femmes représentent 80% des temps partiels.

 

Salaire et déroulement de carrière

 

Les inégalités entre hommes et femmes se manifestent également par des différences de salaire. Les femmes touchent en moyenne 27% de salaire de moins que les hommes. A poste et expérience équivalente, les femmes perçoivent en moyenne 10% de revenus en moins que les hommes.

Cette inégalité se traduit aussi par un déroulement de carrière inférieur : les femmes grimpent moins et moins vite que les hommes. Les postes à responsabilité ou de direction sont le plus souvent occupés par des hommes.

Ces inégalités d'accès à l'emploi et de carrière ont aussi des conséquences sur les droits à la retraite. En moyenne, selon l’Observatoire des inégalités, les femmes perçoivent une pension inférieure de 42 % à celle des hommes.

 

Sexisme au travail et harcèlement sexuel

 

Les femmes peuvent être non seulement victimes de discrimination à l'emploi, mais elles sont aussi victimes sur leur lieu de travail d’oppressions spécifiques du fait qu'elles sont des femmes.

Elles peuvent être par exemple victimes de sexisme. Cette attitude consiste à inférioriser par des comportements, des propos, qui peuvent prendre la forme de blagues, une personne du fait qu'elle est une femme. La notion de sexisme a été forgée, par les féministes, à partir de celle de racisme.

Un autre type d'oppression spécifique que peuvent subir les femmes sur leur lieu de travail, consiste dans le harcèlement sexuel. Les agressions à caractère sexuel touchent effectivement de façon majoritaire les femmes. C'est pourquoi la législation sur ces questions a souvent été mise en oeuvre sur la demande des organisations de défense des droits des femmes. Au sens juridique, il y a harcèlement sexuel "lorsqu’une personne agit en vue d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers".

 

 

Double journée: soin des enfants et tâches ménagères

 

La situation des femmes dans le milieu professionnel ne peut pas être comprise si elle n'est pas mise en relation avec leur situation dans le cadre domestique. En effet, les femmes effectuent une double journée qui les conduit à assumer la majorité des tâches ménagères et d'éducation des enfants. Les femmes effectuent 3h30 en moyenne par jour, contre 2h pour les hommes, de tâches ménagères.

Elles ont encore majoritairement en charge le soin des enfants. Cela explique en grande partie pourquoi elles optent pour le temps partiel afin par exemple que le foyer puisse économiser les frais de garde le mercredi.

 

Les femmes dans les organisations militantes et syndicales

 

Le fait que le temps « de loisir » des femmes soit, plus souvent que celui des hommes, occupé par les tâches ménagères et l'éducation des enfants, induit une plus faible disponibilité pour s'investir dans les activités militantes.

De manière générale, la société occidentale avait réservé aux femmes le gouvernement domestique et aux hommes le gouvernement de la cité. Cet aspect perdure dans la culture militante, qu'elle soit politique ou syndicale.

Les femmes sont sous-représentées dans les organisations syndicales et en particulier aux fonctions de responsabilité.

 

Théories féministes et compréhension des inégalités sociales hommes/femmes

 

Il est possible de distinguer quelques courants féministes qui ont fourni des explications différentes aux inégalités de sexe et insisté sur des revendications elles aussi distinctes.

 

  • Le féminisme libéral-égalitariste : Les premiers mouvements féministes, ce que l’on a appelé la première vague du féminisme, ont insisté sur l’égalité des femmes et des hommes en matière de droits civils et politiques. Il s’agissait de revendiquer que les femmes, en tant qu’êtres humains, aient les mêmes droits que les hommes : mêmes droits d’accès au travail, mêmes droits politiques comme le droit de vote, mêmes libertés publiques…

 

  • Le féminisme marxiste ou féminisme lutte des classes :Engels, dans L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat, fait de l’apparition de l’inégalité sociale entre hommes et femmes, une conséquence de l’apparition de la propriété privée et donc des classes sociales. Pour les féministes dites « lutte des classes », il s’agit donc que les femmes prolétaires combattent au côté des hommes prolétaires pour abolir le système capitaliste et la propriété privée.

 

  • Le féminisme radical matérialiste : Les féministes radicales pensent, à la différence des féministes marxistes, que les femmes sont opprimées du fait d’un système spécifique, le patriarcat, qui n’est pas une simple conséquence de la propriété privée, mais qui apparaît bien avant. Ainsi dans les sociétés de chasseurs cueilleurs, la division du travail, n’est pas la marque d’une simple complémentarité, mais d’un rapport d’inégalité sociale. Le patriarcat est donc un système d’exploitation spécifique se traduisant par le fait que les femmes subissent des formes d’exploitation économique qui leurs sont propres, telles que le travail domestique. Cela conduit les féministes matérialistes à penser que les femmes forment une classe sociale spécifique, une classe de sexe, exploitée par une autre classe sociale, la classe de sexe des hommes. Les féministes matérialistes mettent ainsi plus particulièrement en avant la lutte contre des formes d’oppression plus spécifiques aux femmes, telles que les violences sexuelles.

 

      Les axes de revendications

 

Cette rapide synthèse permet de dégager les principaux axes de revendication en faveur d'une égalité entre homme et femme dans le cadre du travail:

 

- oeuvrer à cette égalité suppose d'agir tout d'abord au niveau du système éducatif pour remettre en cause les stéréotypes d'une éducation genrée.

 

- cela signifie aussi lutter dans le cadre du travail domestique afin de faire cesser la répartition inégalitaire des tâches ménagères et de l'éducation des enfants. C'est pourquoi, des féministes ont pu appeler à la grève des tâches ménagères.

 

- cela suppose également de revendiquer une égalité salariale, une lutte contre la discrimination à l'embauche, ou encore la possibilité de droit d'accéder à un travail à temps complet pour les salariés qui le désirent.

 

- enfin, cette lutte contre les oppressions que subissent les femmes dans le cadre professionnel  passe aussi par des actions contre les propos sexistes ou le harcèlement sexuel.